L. Festinger et la théorie de la dissonance cognitive

La théorie de la dissonance cognitive (1957) est l’une des théories les plus connues de la psychologie sociale. Elle a été élaborée aux États-Unis par Léon Festinger (1919-1989), professeur en psychologie sociale à l’Université Stanford (Palo Alto, Californie).

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L. Festinger et la théorie de la dissonance cognitive
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La dissonance cognitive

D’après la théorie de la dissonance cognitive, lorsque les circonstances amènent une personne à agir en désaccord avec ses croyances, cette personne éprouvera un état de tension inconfortable (conflit intérieur) appelé dissonance cognitive. Selon Léon Festinger, aussi surprenant que cela puisse paraître, lorsqu’un individu est amené à agir en contradiction avec ses convictions, il aura tendance à justifier ses actions et à adapter ses opinions à ses comportements. Selon cette théorie, l’unité de base de la théorie de la dissonance cognitive est la cognition. Elle est définie comme tout élément de « connaissance, opinion ou croyance sur l’environnement, sur soi-même ou sur son propre comportement » (Festinger, 1957, p. 9). Les différentes cognitions peuvent entretenir entre elles trois types de relations : la dissonance, la consonance, ou la neutralité.

Deux cognitions sont considérées comme dissonantes quand elles créent une tension contradictoire au niveau du message qui est transmis à l’individu. Elles sont en revanche, consonantes quand elles se renforcent ou complètent, et neutres lorsqu’elles n’ont pas de rapport. Ainsi, selon Festinger (1957), toute relation de dissonance entre cognitions amènerait l’individu à ressentir un état d’inconfort psychologique appelé « dissonance » en l’amenant à changer son comportement pour résoudre cette situation de tension intérieure. Par exemple, dans les travaux sur la dissonance, on amène le sujet à donner des arguments en faveur de la peine de mort alors qu’il est contre. Ce dernier est confronté à « problématique » et qui l’amène à ressentir un état d’inconfort. On étudie ensuite les conséquences en termes d’opinions ou de comportements liées à cette situation. On va alors se rendre compte que le sujet se prononcera en définitive, comme étant moins défavorable à la peine de mort qu’il ne l’était auparavant, ajustant ainsi son attitude initiale, de manière à la rendre davantage conforme (gestion des tensions) à l’acte problématique réalisé. Plus la dissonance sera forte, plus le travail pour réduire la dissonance sera important.

L’individu dispose de plusieurs stratégies pour réduire la dissonance (on parlera de modes de réduction). Il s’agit avant tout d’agir sur les cognitions en présence, en cherchant par exemple à modifier leur nombre ou leur importance, afin d’influer sur le taux de dissonance (rapport de l’ensemble des cognitions inconsistantes).

Les modes de réduction de la dissonance

La plupart des modes de réduction de la dissonance sont déjà évoqués par Festinger (1957), soit explicitement, soit au travers d’illustrations. En matière de stratégies possibles, on peut notamment citer la rationalisation cognitive, la rationalisation comportementale, la trivialisation et enfin le support social.
 

La réduction de la dissonance s’opère le plus souvent par un changement d’attitude post-comportemental visant à modifier une cognition inconsistante. Par le biais d’un processus de rationalisation cognitive, l’individu va modifier son attitude initiale, afin de la rendre plus conforme au comportement problématique réalisé (attitude finale moins inconsistante). L’individu va en effet faire en sorte que sa résistance au changement se révèle plus faible qu’attendu initialement, en modérant l’enjeu et les contradictions possibles.

La dissonance peut également être réduite lorsque, suite à un comportement problématique, la personne a la possibilité de réaliser un second comportement allant dans le même sens, visant à conforter ses choix : on parle alors de rationalisation comportementale.

Pour réduire la dissonance, l’individu peut aussi dévaloriser son comportement problématique ou l’attitude qu’il avait initialement. on parlera alors de trivialisation. Par exemple, il n’accordera que peu d’importance au comportement réalisé ou considérera in fine son attitude initiale comme secondaire (marginale).

Enfin, lorsque ses croyances sont infirmées, l’individu dissonant est susceptible d’essayer de modifier son univers social pour le rendre consistant avec ses croyances. Il va ainsi s’entourer de personnes (support social) qui adhèrent à son point de vue, et éviter les personnes susceptibles de le remettre en cause.

Conclusion

Dans le champ de la psychologie sociale, la dissonance cognitive est la tension interne propre au système de pensées, croyances, émotions et attitudes (cognitions) d’une personne lorsque plusieurs d’entre elles entrent en contradiction l’une avec l’autre. Le terme désigne également la tension qu’une personne ressent lorsqu’un comportement entre en contradiction avec ses idées ou croyances. Elle correspond à un état d’inconfort qui sera éveillé dans des circonstances particulières dites engageantes, suite, le plus souvent, à la réalisation d’un comportement problématique. Ces travaux de recherche se fondent sur l’hypothèse d’un besoin fondamental de cohérence interne chez l’individu. Le concept central de dissonance cognitive a été formulé pour la première fois par le psychologue Leon Festinger dans son ouvrage A theory of cognitive dissonance (1957). Cette théorie vise par conséquent à expliquer comment l’être humain gère les tensions engendrées par des éléments incompatibles, et à rechercher des modes de réduction de la tension psychologique induite et le maintien de la cohérence personnelle de l’individu. La théorie de la dissonance fait encore aujourd’hui l’objet de nombreuses discussions et débats, et ne cesse de générer de nouvelles approches et démarches stimulantes dans la compréhension des mécanismes cognitifs et comportementaux de l’être humain.

Pour aller plus loin

Festinger L., A cognitive dissonance theory, Stanford, Stanford University Press, 1957.
Festinger L. et Carlsmith J.M., Cognitive consequences of forced compliance, Journal of Abnormal and Social Psychology, 58, 1959, p. 203-210.
Festinger L., Riecken H.W. et Schachter S., When prophecy fails : a social and psychological study of a modern group that predicted the end of the world, Minneapolis, University of Minnesota Press, 1956.

Note

Note sur l’auteur (CV OM)

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