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L'inspecteur hygiène et sécurité face aux risques psychosociaux en entreprise

29/06/2012



Les études portées sur l’environnement psychosocial dans le monde du travail se basent sur des modèles bien définis. Plusieurs types de méthodes ont été élaborés afin de mieux cerner, tant les contraintes liées au travail que l’état de santé des travailleurs ; parmi lesquels figurent le modèle de Karasek et le modèle de Siegrist. Si le premier s’oriente vers les concepts de « demande psychologique » et d’« autonomie décisionnelle », le second se base surtout sur la notion d’« effort » et de « récompense ». Selon les études réalisées, ces deux modèles sont pourtant complémentaires, et à eux s’ajoutent différentes formes d’approches, dont la combinaison optimise la prévention des risques psychosociaux en entreprise. La concrétisation de ces approches implique automatiquement l’intervention de différents acteurs. « À froid », mais surtout « à chaud », l’IHS ou Inspecteur hygiène et sécurité peut notamment entrer en jeu.



Image: FreeDigitalPhotos.net
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I. Les modèles théoriques d'évaluation en vigueur

Il s’agit d’instruments pouvant être utilisés dès l’étape d’évaluation jusqu’aux différentes formes de mise en œuvre, dans le cadre de l’étude de l’environnement psychosocial en entreprise.
 
Le modèle de Karasek
Le modèle de Karasek constitue le plus ancien instrument, élaboré dans le cadre d’une évaluation psychosociale au travail. Il permet d’étudier deux principaux éléments environnementaux : l’ « autonomie décisionnelle » et la « demande psychologique ». Cette dernière regroupe plusieurs critères permettant de définir et d’étudier les situations des travailleurs. Elle inclut notamment les exigences psychologiques des salariés, les contraintes liées au temps d’exécution – demandes imprévues, interruptions du travail, ou encore contradictions dans les commandes – ainsi que la quantité des tâches à effectuer par chaque travailleur. L’autonomie décisionnelle, également nommée « latitude » décisionnelle fait, quant à elle, référence au degré de créativité du salarié, à sa capacité d’exploiter et d’enrichir ses compétences, ainsi qu’à sa manière de prendre les décisions.
 
Le modèle de Karasek met l’accent sur le lien entre la demande psychologique et la latitude décisionnelle, et explique la possibilité d’une situation à risque au niveau de la société par la combinaison d’une faible autonomie et d’une importante demande psychologique. Ce risque est particulièrement élevé en ce qui concerne les pathologies cardiovasculaires, et se retrouve, par ailleurs, accentué par l’insuffisance du soutien social dans le monde du travail. À l’aube des années 90, le modèle de Karasek s’associe à ce concept de « soutien social », qui inclut tant les soutiens techniques que socio-émotionnels au niveau du travail. Ce qui lui permet désormais d’identifier les différentes interactions sociales entre collègues ou de la part des supérieurs. Le degré de soutien social au niveau de l’entreprise influence, en effet, largement l’état de santé des travailleurs. Et ce, indépendamment des demandes psychologiques et d’autonomie décisionnelle.
 
Le modèle de Siegrist
Plus récent que le modèle de Karasek, celui de Siegrist se fonde sur le lien entre efforts fournis et récompenses attendues. Selon ce second modèle, élaboré à la fin des années 80, le travailleur s’attend à ce qu’il y ait équilibre entre les deux éléments. Le cas échéant, des risques de tensions peuvent se présenter. Le concept de récompense fait principalement référence aux avantages donnés au travailleur après tel ou tel accomplissement professionnel. L’individu s’attend automatiquement à des retours, par rapport aux efforts qu’il a fournis dans son travail. Il est surtout, ici, question d’estime de soi. Augmentation de salaire, promotion pour un poste meilleur, ou autres… il s’agit d’attentes dans le cadre de la « réciprocité sociale ». Le concept d’« efforts » abordé par le modèle de Siegrist, reprend, quant à lui, quelques idées de Karasek, notamment ce qui concerne la demande psychologique. Responsabilités, quantité des tâches, degré de difficulté, contraintes, interruptions, ou encore exigences contradictoires, il s’agit surtout de la capacité du travailleur à y faire face, mais également de son implication dans les tâches, afin d’atteindre les objectifs prédéfinis.
 
Toujours en référence à la notion d’« effort », le modèle de Siegrist étudie également le concept de surinvestissement. Dans le cadre de son travail, l’individu peut en effet être amené à laisser sa vie privée de côté ou à combiner les deux, par difficulté de prendre les distances nécessaires. Les préoccupations engendrées par le travail peuvent ainsi envahir la vie privée du salarié, et automatiquement, impactent sur son état de santé. Cette notion de surinvestissement peut être évaluée selon les facteurs propres de chaque individu. Des éléments extérieurs peuvent également entrer en jeu, notamment dans le contexte de précarité de l’emploi, entre autres.
 
Selon le modèle de Siegrist, la combinaison d’un taux d’efforts élevé et de faibles récompenses constitue la source principale d’une tension socio-émotionnelle au niveau de l’entreprise. Le surinvestissement en constitue un facteur supplémentaire, responsable du déséquilibre, dont les manifestations peuvent être tant comportementales que psychologiques.

Des approches complémentaires
Selon des études réalisées sur l’environnement psychosocial au travail et les risques de déséquilibre au niveau de la branche sociale de l’entreprise, les approches avancées par les modèles Siegrist et Karasek s’avèrent complémentaires. Les manifestations de l’instabilité des salariés au niveau de la société, qu’elle soit dépendante ou non des indicateurs de santé, se rejoignent également sur le même rang. Aussi, selon les buts fixés par les évaluations, d’autres instruments peuvent entrer en jeu.
 
Dans le cadre de la détection des éléments dits « stresseurs », les questionnaires peuvent notamment jouer un rôle majeur. À titre d’exemple, il est entre autres possible de déterminer le degré d’exposition du salarié à une violence psychologique au travail, et d’en estimer l’importance, via de simples questions. En principe, le questionnaire se base sur une liste de 45 situations traduisant la manifestation de violence de la part des subordonnés, collègues, ou des supérieurs du salarié. Il permet de déterminer et d’étudier la durée d’exposition de ce dernier à ces cas de violence, ainsi que d’évaluer la fréquence de cette exposition.
 
Particulièrement en ce qui concerne l’état de santé mentale des travailleurs, d’autres formes de questionnaires peuvent s’ajouter aux approches de Siegrist et de Karasek. Le questionnaire Hospital Anxiety Despression ou HAD, appliqué dans le cadre de l’enquête Sumer 2009, a notamment permis de relier les résultats issus de ces deux modèles et la santé psychique des salariés. Il s’agit surtout de combiner les différents concepts afin de faciliter, mais également d’optimiser les évaluations. Dans le cadre d’une étude portée sur un thème précis, l’épuisement de l’individu au travail par exemple, le questionnaire « Maslach burnout inventory » peut notamment être utilisé.
 
En dehors des thèmes principalement abordés par les études psychosociales au travail, d’autres dimensions plus détaillées peuvent également s’ajouter aux concepts. À titre d’exemple, un « contact difficile avec le public » figure parmi les facteurs probables d’un déséquilibre psychosocial. Des questions se posent également en ce qui concerne la place de la conscience professionnelle par rapport aux obligations dans le travail.