RSE Magazine
 
RSE Magazine
Accueil
Envoyer à un ami
Version imprimable
Partager

L'inspecteur hygiène et sécurité face aux risques psychosociaux en entreprise

29/06/2012





II. L'évaluation du risque de souffrance psychique en pratique

Dans le cadre de l’évaluation des risques professionnels, particulièrement sur le plan psychosocial, l’IHS joue le premier rôle de conseiller. La prévention de ces risques au niveau d’une structure implique plusieurs étapes, dont les recueils d’informations et les analyses. Notamment en ce qui concerne la souffrance psychique au travail, les risques peuvent être évalués à partir d’études quantitatives et qualitatives, mais cela reste insuffisant dans la mesure où il est nécessaire de définir une stratégie globale, tenant compte de la réalité du travail, en termes de pratique. Les informations recueillies durant l’étape de diagnostic sont à compléter, afin que les plans d’action de prévention soient réellement adaptés aux situations de l’entreprise, et particulièrement des salariés. Plusieurs méthodes peuvent alors entrer en jeu, mais dans tous les cas, l’accent doit être mis sur la dimension « collective » de la problématique.
 
Quel que soit le modèle de référence utilisé dans l’analyse, il est essentiel que celle-ci soit orientée vers les concepts de collectivité et de groupe. Ces dernières constituent en effet le point de départ vers une meilleure synergie qui, à travers les interactions entre groupes et entre individus, conduit à la notion de compétence collective. Il ne s’agit pas uniquement de la « somme » des qualifications individuelles, mais va bien au-delà, vers une combinaison plus liée. Afin d’optimiser l’analyse, la considération d’une dimension collective ne suffit cependant pas. Car constituant l’élément d’un groupe, chaque individu se doit de s’attribuer une place bien définie. Quel est le rôle de l’individu au niveau de l’organisation, et quelles sont les fonctions affectées à celle-ci ? Telles sont les questions nécessitant une certaine analyse. Il est tout aussi essentiel de définir le périmètre des collectifs à prendre en considération, la conciliation entre groupe et individu, ainsi que les relations existant au niveau de la collectivité au quotidien. Les nouvelles méthodes d’encadrement au sein de la structure, ou encore la situation générale du groupe par rapport à l’espace et le temps… sont autant d’éléments à prendre en compte dans le cadre de l’étude.
 
La prévention de la souffrance psychique au travail implique des recherches minutieuses et détaillées, notamment afin de découvrir les réelles sources du déséquilibre. Des analyses doivent notamment être réalisées afin de déterminer les ressources existantes au sein de l’organisation, ainsi que le potentiel de l’ensemble des participants. Il s’agit tout aussi bien de détecter les capacités à valoriser, de déterminer les points forts et d’y mettre l’accent. L’objectif est surtout de définir les « potentialités des collectifs de travail », qui contribuent, que ce soit de façon directe ou indirecte, à l’optimisation des relations au niveau de l’entreprise. Et ce, afin de pouvoir établir des plans d’action adaptés.
 
Les recherches entamées dans le cadre de la prévention de la souffrance psychique au travail impliquent la considération de différents acteurs, principalement ceux prenant part, directement ou indirectement, à la structuration de l’organisation. L’étape de recueil d’informations est essentielle lors de l’analyse, dont l’objectif reste la détermination de points précis, liés à la souffrance psychique au travail. Dans le cadre de cette étude, l’IHS collecte les données auprès des acteurs de la sécurité de la santé, auprès du Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, mais également auprès de la direction, ainsi que des représentants du personnel. Des entretiens permettent déjà de regrouper des informations relatives à la problématique, mais cette première étape se limite uniquement au recueil de données. Le processus se poursuit dans le temps, permettant à l’IHS de mieux explorer les détails et d’établir des constats et appréciations objectifs, par rapport à la situation psychosociale détectée au sein de l’entreprise. De ces observations sont ensuite tirés les propositions et les plans d’amélioration, adressés alors au chef de service.
 
Il s’agit surtout ici de points de repère permettant l’optimisation des analyses. Ces éléments contribuent, non seulement à la facilitation des démarches d’études, mais permettent aux différents acteurs, dont notamment à l’IHS, de mieux cerner la dynamique de l’organisation, le climat social et son évolution, ainsi que les positionnements au niveau de l’entreprise. Les recherches affectées à la prévention de la souffrance psychique au travail permettent tout aussi bien de déterminer la place des débats et du dialogue social au sein de la structure. Il s’agit d’éléments d’appui contribuant à la concrétisation de l’adaptation et de l’évolution, dans le cadre d’une vision globale de la prévention de la souffrance psychique au travail.
 

« Collectifs de travail », détecter les potentialités
 
L’aboutissement des recherches et l’efficacité des plans d’action qui en sont issus passent par le repérage des potentialités des collectifs de travail. Les indices ci-après permettent de faciliter cette étape de détection à travers des approches bien définies, appuyant notamment l’IHS dans sa perception de la problématique.
  • Identifier les possibilités dans le cadre d’une insécurité institutionnelle
Ce premier point fait référence au repérage des éléments de stabilité au niveau de l’organisation, dans un contexte d’insécurité institutionnelle. Il regroupe différents points à déterminer, essentiels à la réinstauration de l’équilibre. Il est notamment nécessaire d’apporter un certain éclaircissement au niveau des positionnements des acteurs au sein de l’entreprise. Niveaux d’encadrement, place de chaque agent, ainsi que celle de la direction… ce premier point met l’accent sur le rôle de chaque intervenant en cas de désaccords. Il est tout aussi indispensable de déterminer le degré de nécessité du partage d’informations, entre autres sur la mise en application de la RGPP, ou encore sur les changements professionnels au sein de l’entreprise. L’encadrement est-il disponible ? Et quel est son niveau d’implication ? Sont autant de questions qui méritent des réponses lors de l’analyse.
 
  • Observer la pratique
 
Dans le cadre de la prévention de la souffrance psychique au sein de l’entreprise, il est essentiel de repérer l’existence d’un lien entre les théories et les pratiques. L’étude des conditions de concrétisation dans le travail doit être structurée, en passant notamment par une observation minutieuse de la pratique. Sur cette observation même se basent l’élaboration d’un axe d’amélioration collectif, ainsi que le repérage des dysfonctionnements au niveau des réformes. Les échanges réalisés dans le cadre de cette étape doivent être organisés et préparés. Toutes catégories d’agents étant concernées par l’observation de la pratique.
 
  • Repérer les éléments à considérer pour un débat sur la qualité du travail
 
Quelques points sont à prendre en compte afin de déterminer si le débat couvre tous les aspects, notamment relatifs à la notion de « qualité » au travail. Dans un premier temps, il est d’abord indispensable de définir le concept de travail de qualité lui-même, et de prendre en considération les différentes contraintes qui l’accompagnent. Un travail bien fait, mais également des actions interdites, mais indispensables aux réalisations, ou encore les divers changements par rapport à l’objectif… il est important d’y apporter des éclaircissements, et de définir par la même occasion leurs impacts sur la qualité. Le débat doit également être porté sur le concept de performance, notamment à travers les questions sur les indicateurs et la « procéduralisation » du travail. De même, il est important de parler des modalités d’organisation des tâches en général.
 
  • Déterminer la place des valeurs lors du débat
 
En tenant compte des structures mises en place et de la réalisation des tâches au sein de l’entreprise, il est essentiel de porter un regard sur les valeurs et le sens du travail. Face aux diverses contradictions possibles, quelle est la place de  la conscience professionnelle, du renoncement, ainsi que des choix de l’individu en tant que tel. Et qu’en est-il de la difficulté de relations de la personne avec le public ? Exigences de sens, ou encore conflits de valeur, des mises au point s’imposent.
 
  • Définir les conditions du débat
 
La libre expression reste le premier point à considérer dans l’organisation d’un débat. Quelques questions méritent d’être posées. Les conditions mises en place offrent-elles aux agents, ainsi qu’à la direction, la possibilité d’exprimer leurs idées sans aucune crainte ? Les demandes du personnel sont-elles réellement étudiées, et des réponses sont-elles apportées ? Le débat doit également prendre en compte les principes du CHSCT et des organisations syndicales, et déterminer si un droit d’expression collectif et direct sur l’organisation et les modalités du travail est conforme aux règles. Il est tout aussi essentiel que les modalités de décision tiennent compte des niveaux de l’encadrement, des représentants du personnel, ainsi que du rôle du chef de service.
 
  • Déterminer si les ressources sont suffisantes ou non pour atteindre la qualité
 
La fixation d’objectifs, notamment dans le cadre de la qualité, implique le repérage des moyens disponibles, particulièrement sur le plan organisationnel. Entre autres en ce qui concerne la diminution des effectifs, il est important que les prises de décisions passent par des négociations et des concertations au niveau de chaque département concerné. Les difficultés doivent être déterminées et les missions supprimées ou externalisées bien définies. Les choix doivent être explicites, basés sur des faits concrets, et en cas de non-éclaircissement, la problématique doit être montée au niveau supérieur. Dans ce même contexte, il est important de définir les missions de l’encadrement intermédiaire et de simplifier les démarches de décision. Le fonctionnement des délégations devient également plus souple, et le développement des compétences collectives est optimisé à travers la promotion du dialogue et de l’échange.
 
  • Identifier le sens de l’observation des acteurs par rapport aux risques
 
Ce septième point met particulièrement l’accent sur l’attention des professionnels par rapport aux signes d’alertes quotidiens. Ces acteurs prennent-ils en considération les risques de déséquilibre afin de restructurer les plans organisationnels mis en place ? Il est également essentiel de déterminer si l’encadrement reste attentif aux différents conflits au sein du collectif, éléments dont les conséquences incluent la détérioration globale du climat de travail.
 
  • Repérer la présence d’un axe collectif de conduite en cas de crise
 
Le repérage fait principalement référence, ici, aux cas de harcèlement pouvant survenir durant les situations de crise. Dans un premier temps, il est essentiel de déterminer les connaissances partagées entre les acteurs dans de telles circonstances. Qui sont les principaux intervenants et quelles sont les ressources disponibles ? Afin de sanctionner, mais surtout de prévenir le harcèlement, quelles sont les dispositions à prendre ? Plusieurs dimensions entrent automatiquement en jeu, dont principalement le socio-médical. Un second axe met l’accent sur l’efficacité et la disponibilité de l’encadrement. Une situation de crise imposant aux responsables une capacité à rester attentif, objectif, mais également à apporter les réponses nécessaires tout en gardant une certaine distance.