Les grandes surfaces nous empoisonnent-elles ? Laurent Richier, ancien boucher, nous dit tout

Je n’en pouvais plus de voir et faire toutes les choses horribles que je pratiquais journalièrement. La remballe quotidienne, les caddys entiers de viande jetés à la poubelle journalièrement. Tant d’animaux tués dans la souffrance pour rien. Je n’en pouvais plus ! La fin du confinement a accéléré les dérives machiavéliques de la grande distribution. Mes hiérarchies successives dans les magasins ou j’ai travaillé voulaient garder le même chiffre d’affaires alors que les restaurants avaient réouvert leurs portes. Ils ne comprenaient pas ou faisait semblant de ne pas comprendre que cela était complétement impossible. C’est d’ailleurs à ce moment-là et dans une tristesse profonde que j’ai décidé d’écrire ce livre, mais en étais-je capable ?

La remballe est une pratique frauduleuse. Elle consiste pour un supermarché ou hypermarché à mettre de la viande qui a atteint sa date limite de consommation dans un nouvel emballage avec une nouvelle date de péremption. C’est une pratique courante dans le métier. Le matin j'avais l'ordre de mes supérieurs, dans plusieurs magasins ou j’ai travaillé, d’aller en rayon pour retirer les barquettes dont la DLC était dépassée. Je parais alors le morceau de viande pour lui donner une nouvelle fraicheur et elle retournait en rayon pour 4 voire 5 jours supplémentaires. Celle qui était vraiment abimée de part sa couleur ou son aspect et même son goût prenait la direction du broyeur afin d’en faire de la chair à saucisse par exemple… Mais la remballe est trop souvent le fer de lance des chefs boucher qui ne pensent qu’à leurs primes en fin de mois. Un billet vaut mieux qu’une vie humaine pour beaucoup.

Oui tout ce que je fabriquais au quotidien pour certaines grandes surfaces me dégoutait au plus au point. Je n’ai jamais été un viandard, j’étais plutôt fléxitarien. Mais quand je mangeais un morceau de viande, j’imaginais la souffrance que le pauvre animal avait pu subir lors de sa mise à mort. Et puis combien de fois j’ai paré des rôtis de bœuf dont la DLC était dépassés. Pour que l’arnaque ne soit ni vu ni connu, je l’emballais dans de la barde qui cachait son aspect de manière à ce que le client ne se doute de rien. Un jour je me suis dit, Je ne mangerai plus de cadavre de ma vie ! 

Je n’ai aucune prétention mais les contrôles doivent être plus rigoureux. L’exportation des animaux doit être contrôlée, elle aussi plus rigoureusement.
Les préparations de plats préparés ou autres doivent être soumis à des contrôles de l’hygiène et ce régulièrement.
Je vais me battre de toute mes forces pour faire comprendre aux consommateurs qu’une vie est une vie.
Un monde sans abattoir, sans camp de la mort, c’est mon rêve, un rêve qui pourrait devenir une réalité quand l’humain aura compris qu’en tuant les animaux il se tue lui aussi.
Les animaux, les océans, la nature ont déclaré un cancer, s’il se généralise c’est nous toutes et tous qui disparaitrons de cette belle planète bleue.