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Les édifices du culte, parents pauvres du loto du patrimoine

Nicolas Deiller
13/06/2019



Le 11 juin dernier, Stéphane Bern donnait la liste des 121 monuments sélectionnés pour le loto du patrimoine. Le principe est simple : un billet acheté permet de récolter de l’argent au profit de la restauration de ces édifices. Si on peut regretter que la survie de ces édifices passe par un loto, il faut néanmoins prendre conscience que la restauration d’une simple petite église de campagne peut atteindre plusieurs centaines de milliers d’euros, aux frais de la puissance publique.



Ce que l’on peut vraiment regretter, c’est la très faible proportion des édifices religieux dans les monuments sélectionnés. En effet, seulement 22 églises, une mosquée (à Mayotte) et une synagogue vont être restaurées par ce biais... Pourtant, les édifices du culte nécessitant une restauration en profondeur sont légion, comme le rappelle l’Observatoire du Patrimoine Religieux.

Au-delà du loto du patrimoine, ce sont principalement les communes qui ont la charge de la restauration des édifices du culte – généralement les églises catholiques qui demeurent propriété des communes conformément aux lois issues de la séparation des Églises et l’État.

L’article 13 de la loi de 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État permet justement aux communes d’engager des finances publiques pour la restauration de leurs monuments religieux. Toutefois, les communes ne sont pas obligées de restaurer ces édifices... mais y sont néanmoins fortement incitées, puisqu’elles peuvent être reconnues responsables des dégâts causés par un défaut d’entretien. Le Conseil d’État a reconnu ce principe par sa célèbre décision Monségur (1), qui considère que la commune se doit d’entretenir correctement ses édifices et notamment les biens les garnissant (en l’espèce, il s’agissait de joints de scellement du bénitier qui avaient cédé, faisant tomber ce dernier sur les jambes d’un jeune garçon).
 

Ed. VA Editions
Ed. VA Editions
Bien sûr, les communes ont souvent à cœur de conserver les monuments religieux, mais se pose l’épineuse question du coût des restaurations. À titre d’exemple, la restauration très partielle de l’église Saint-Thibault de Joigny coûte à la commune de 10 000 habitants, près de 2 millions d’euros ! Une somme que nombre de communes plus modestes ne peuvent financer...
La problématique de la restauration des édifices du culte est symptomatique de notre temps : la préservation coûteuse de nos racines.
 
Nicolas Deiller
Docteur en Droit public
 
 
(1) CE, 10 juin 1921, Commune de Monségur contre époux Lalanne, Sirey, 3ème partie, 1921, p. 49.