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Le low-cost est-il un modèle économique viable dans l'optique ?

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28/10/2019



47% (1) des français déclarent avoir déjà renoncé à des équipements optiques. En cause : leur coût trop élevé. Dans ce contexte, les professionnels de l’optique font face à une nouvelle concurrence : grande distribution, marques low-cost… Retours sur les enjeux de la filière en pleine disruption.



Une paire de lunettes à 10 euros prête en 10 minutes ? C’est la folle idée défendue par Paul Morlet qui imagine un nouveau business model accessible à tous. L’objectif ? Répondre aux besoins et aux envies de tous les clients : enfants, adultes mais aussi chômeurs ou personnes démunies ayant des difficultés à s’équiper de lunettes. En 2014, le jeune entrepreneur ouvre son premier concept store, aidé par Xavier Niel qui avance un million d’euros pour créer l’entreprise « Lunettes pour tous ».
 
Le secret de la rentabilité : 110 ventes de lunettes par jour
 
En 2017, l’entreprise a réalisé un chiffre d’affaire de 21 millions d’euros, qui correspond à la vente de 500 000 montures dont le prix moyen s’élève à 42 euros. La rentabilité est donc basée sur le volume des ventes. Paul Morlet précise d’ailleurs à Forbes : « nous sommes obligés de nous installer dans des villes denses car nous devons vendre 110 paires par jour ». Une injonction de rentabilité au détriment de l’accompagnement client : 10 minutes chez « Lunettes pour tous », contre 42 en moyenne chez un opticien « traditionnel ». Face à ce succès, force est de constater que ce modèle répond aux attentes d’une nouvelle clientèle, pressée et peu regardante sur les aspects conseil et services.
 
Autre nouveauté (2) sur le marché de l’optique : la grande distribution qui fait son grand retour dans le secteur. « Optique Leclerc » envisage de multiplier par 2,5 le nombre de magasins d’ici 2025, Carrefour développe l’enseigne « Carrefour Optique et Audition » en s’associant à Atol, et Casino teste son concept « Casino #Optique » à Villeneuve Loubet, en parallèle de ses ventes sur Cdiscount Optique®.
 
La nouvelle concurrence oblige les opticiens à se réinventer
 
Face à cette nouvelle concurrence, les marques traditionnelles déploient de nouvelles stratégies de différenciation pour garder la tête hors de l’eau. Chez Krys, Alain Afflelou ou encore Grand Optical, on met l’accent sur les aides auditives. Alain Afflelou affirme par exemple son statut d’acousticien et défend d’ailleurs un équipement auditif accessible à tous. Certaines enseignes prennent le contrepied des marques low-cost en positionnant leur offre sur le très haut-de-gamme, associé à de très haut niveau de services pour une clientèle forcément plus exigeante. C’est le cas notamment de l’enseigne Lissac qui propose à ses clients-patients des lunettes 100% sur-mesure. La liste est longue des services qui accompagnent cette prestation chez Lissac : un suivi ultra-personnalisé, un designer de renom, des outils numériques de pointe, des matériaux nobles, une fabrication 100% française ou encore un essai du prototype imprimé sur une imprimante 3D… Cette offre à contre-courant de l’immédiateté du low cost, séduit les consommateurs les plus exigeants, qui veulent encore aujourd’hui un réel accompagnement client.
 
D’autres enseignes se démarquent en affirmant le rôle citoyen des opticiens en tant qu’acteurs de santé, et quittent les murs de leurs magasins pour partir à la rencontre des patients. C’est le cas d’Optic 2000 qui opère depuis plusieurs années une stratégie « hors les murs ». Yves Guénin, secrétaire général du Groupe précise que « face aux enjeux du renoncement aux soins, l’optique doit sortir des magasins. Pour aller, notamment, à la rencontre des personnes dont les déplacements sont particulièrement difficiles ». Visites à domicile, permanence d’opticiens dans les pharmacies des déserts médicaux, « rendez-vous prévoyance » dans les EPHAD ou sensibilisation à une bonne santé visuelle dans les entreprises : autant de nouveaux points de contacts que la coopérative Optic 2000 utilise pour attirer de nouveaux clients ou fidéliser les anciens.
 
Optic 2000, enseigne numéro un de l’optique en France, suit en ce sens l’évolution des modes de consommation : plus de conseil, de proximité et d’individualisation de la relation-client. Les produits optiques restent des produits de santé, pour lesquels une approche reposant sur le seul critère prix n’est pas forcément le plus pertinente aux yeux de la majorité des consommateurs. Preuve en est, les modes de commercialisation initialement présentés comme « disruptifs », tels la vente sur internet ou le low-cost en magasins, n’ont pas débouché sur les bouleversements du marché escomptés. Ils ont certes trouvé leur créneau, mais celui-ci reste encore étroit. Même la très innovante marque Sensee, qui faisait de la vente exclusive sur internet son credo, s’est finalement résigné à ouvrir des magasins physiques en 2015 (4).
 
Dans une société de consommation où la rapidité est devenue une norme, et l’immédiateté une habitude, le temps et l’attention accordés au client deviennent des arguments de vente et un élément marketing fort. Un créneau qui devrait permettre aux opticiens traditionnels de conserver leur avantage concurrentiel quelque temps encore.
 
Sources :
(1) https://100pour100sante.fr/portfolio-item/les-francais-et-la-reforme-100-pour-100-sante/
(2) https://www.lesechos-etudes.fr/news/2019/07/31/marche-optique/
(3) https://www.journaldeleconomie.fr/Face-aux-enjeux-du-vieillissement-ou-du-renoncement-aux-soins-l-optique-doit-sortir-des-magasins-par-Yves-Guenin_a6051.html
(4) https://www.opticien-presse.fr/2015/11/05/sensee-devient-une-marque-et-une-enseigne-de-magasins-physiques/





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