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Carrefour s'entoure d'ONG pour limiter l'impact de son approvisionnement sur la forêt amazonienne

La Rédaction
07/07/2020



Au Brésil, l’élection de Jair Bolsonaro a, d’une certaine manière, constitué un blanc-seing pour les grands propriétaires dont le système économique repose sur une pression et une extension constante sur les terres fertiles du bassin de l’Amazone. Accusé, à maintes reprises, de contribuer à entretenir et financer ce cycle infernal, le groupe Carrefour a fait de la lutte contre la déforestation un engagement depuis 2010 dans le cadre du Consumer Goods Forum (CGF). Retour sur la collaboration esquissée par le distributeur avec différentes ONG, dont la petite association l’Envol Vert implantée en Amérique latine.



Image Wikipedia
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Si les données statistiques sur les feux de forêt en Amazonie constituent un objet permanent de débat, entre les tenants d’une grille de lecture selon laquelle l’élection de Jair Bolsonaro en 2019 aurait constitué un formidable accélérateur de l’emprise industrielle sur les terres fertiles de la forêt primaire et les partisans d’une approche plus mesurée et contextualisée, tous s’accordent cependant à reconnaître que le “poumon vert” de la planète brûle et que tout une partie des décideurs regardent ailleurs. 

Cette dynamique mortifère est, en grande partie, la résultante, et cela par un effet de cascade, des activités économiques de nombreux acteurs, que ce soit de l’industrie agroalimentaire (Lactalis, Bigard ou encore Sodiaal), de la distribution (Leclerc, Système U ou encore Carrefour) ou encore de la restauration (Sodexo, Elior ou encore Burger King). En 2018, Mighty Earth, France Nature Environnement (FNE) et Sherpa avaient interpellé une vingtaine d’entreprises de l’industrie agroalimentaire, ainsi que de la grande distribution, pour pointer du doigt l’impact de leurs activités économiques sur la déforestation et les inviter à adopter un “devoir de vigilance” sur les sources d’approvisionnement.

“Agir pour protéger les forêts”, la prise de conscience de Carrefour sur la problématique de la déforestation

Dans ce contexte, et pour contrecarrer autant que faire se peut, les différentes critiques qui lui sont adressées concernant son emprise sur les forêts, le groupe Carrefour s’est doté d’un engagement en faveur de la protection des forêts. Interrogée par France Culture en octobre 2019, dans le cadre d’un article consacré à l’émoi international suscité par les feux de forêts qui ont ravagé l’Amazonie tout au long de l’été, Agathe Grossmith, directrice de la RSE du groupe Carrefour, avait tenu à souligner que concernant la problématique de la déforestation l’enjeu est d’être humble, ainsi que de mettre en place les meilleurs process afin de s’assurer de la bonne observance, de la part des fournisseurs des différents dispositifs permettant d’éviter les dérives.

Pourtant, et comme le soulignait d’ailleurs implicitement Agathe Grossmith, le chemin est encore long pour parvenir à ces objectifs. D’ailleurs, le groupe Carrefour, implanté au Brésil depuis le milieu des années 70, ne manque pas d’être régulièrement interpellé par les acteurs associatifs, parmi lesquels Mighty Earth, la FNE ou encore Sherpa, pour ses relations commerciales avec Cargill et JBS.

Ce dernier, a d’ailleurs été décrit au printemps dernier par Mediapart comme un “géant controversé de l’agro-industrie brésilienne”. Outre ces deux poids lourds brésiliens auprès desquels s'approvisionnent nombre d’acteurs internationaux, tant de la restauration que de la distribution alimentaire, les entreprises ont également, et fort logiquement d’ailleurs, recours à d’autres fournisseurs, de tailles intermédiaires. C’est notamment auprès de ces derniers que les risques sont potentiellement les plus grands, notamment en raison d’une traçabilité et d’une transparence sur les origines des produits beaucoup plus difficiles à établir.

Les ONG au secours de la stratégie RSE de Carrefour

Pour essayer de limiter son rôle dans la déforestation de l’Amazonie, Carrefour s’est notamment associé à différents acteurs, en 2017 parmi lesquels figurent notamment des organismes associatifs engagé dans la protection des forêts et de la biodiversité comme Envol Vert, afin « d'accroître la transparence et la traçabilité dans les chaînes d’approvisionnement et respecter les engagements de zéro déforestation ». 

L’un des enjeux de ce partenariat visait notamment à construire un outil d’aide à la décision permettant de répondre aux enjeux informationnels et opérationnels liés à la problématique de la traçabilité. Daisy Tarier, présidente de l’association Envol Vert soulignait d’ailleurs, à l’occasion de la signature de ce partenariat, la nécessité d’une collaboration multi-acteurs pour parvenir à des résultats concrets. “

Après des années d’inquiétude commune sans résultats concrets, nous nous rendons compte que nous ne pouvons y remédier que par la collaboration. Partager des informations est une première étape pour la mise en place d’actions collaboratives opérationnelles”, soulignait-elle. Dans le cadre de sa politique de gestion et d’animation de ses nombreuses parties prenantes, le groupe Carrefour, comme le soulignait l’association Envol Vert à l’occasion de son rapport d’activité pour l’année 2017, a notamment rencontré les dirigeants de cette association. Un partenariat et des liens resserrés donc, qui sont d’autant plus essentiels, qu’en Amérique latine, l’association Envol Vert, fondée en 2011 et dont le slogan est “la forêt nous rend service, rendons-le-lui”, exerce une influence significative.

Une logique de partenariat dont Carrefour n’a toutefois pas l’apanage, puisque des acteurs comme Pernod Ricard, Bouygues ou encore Sodexo, également accusés de manière fréquente de contribuer à la déforestation du poumon vert de l’humanité, font également, ou ont fait, partie des “partenaires financiers, en nature et de compétences” de l’association Envol Vert. La présence de Sodexo, au même titre donc que celle de Carrefour, parmi les partenaires et mécènes d’Envol Vert, s’explique pour des motifs, par bien des points similaires à ceux animant le groupe Carrefour, puisque la multinationale française spécialisée dans la sous-traitance de services, fait l’objet de critiques récurrentes sur son impact en matière de déforestation.

D’une certaine manière, la collaboration entre acteurs économiques et monde associatif, qui jusque-là était encore au stade embryonnaire, voire purement utopique, prend forme autour d’objectifs tangibles. Une logique win-win, qui permet aux uns de pouvoir faire des progrès significatifs dans leur lutte, au quotidien pour protéger l’environnement et la biodiversité, et autres, à l’heure de la raison d’être des entreprises, de parvenir à atteindre les objectifs ambitieux, et souvent difficilement réalistes et réalisables, qui structurent leurs stratégies RSE respectives.
 





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