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Achat média : quand les agences s’arment de transparence

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25/08/2017



Le trio annonceurs-agences-médias exprime un impératif besoin de confiance pour aborder la révolution digitale en cours. Les agences indépendantes, elles, ont déjà dégainé leur carré d’As: une transparence totale.



Achat média : quand les agences s’arment de transparence
Les décennies passent et le scénario se répète. Aujourd’hui comme dans les années 90, une crise de confiance s’est installée entre les annonceurs, les agences et les supports média. En 1993, la loi Sapin a tenté de mettre de l’ordre dans la jungle publicitaire, afin de restaurer la confiance entre les acteurs du marché publicitaire. La crise était profonde, les solutions pertinentes pour un marché qui s’organisait principalement atour des media traditionnels print, télé, radio, affichage. En 2017, la donne a changé. L’avènement du digital a de nouveau obscurci les pratiques. La France – championne du monde des règlementations – a certes déjà corrigé la loi Sapin avec plusieurs dispositions de la loi Macron en 2015. Mais d’autres pistes que législatives sont peut-être à explorer.
 
De nombreux professionnels sont unanimes : ce sont aux acteurs eux-mêmes, et aux agences en premier lieu, de redorer le blason d’un secteur terni par les pratiques d’une partie d’entre elles. Bill Koenigsberg, PDG de la première agence media indépendante aux Etats-Unis, Horizon Media, annonce vertement la couleur : « Aujourd’hui, notre objectif est de reconstruire la confiance dans les relations annonceurs-agences, en imposant de meilleures pratiques dans notre métier et mettant en place une véritable transparence. » La situation est en effet urgente, d’autant que de nouvelles problématiques sont apparues avec le marché publicitaire en ligne.

Les raisons de la défiance

Au printemps dernier, une étude publiée aux Etats-Unis par la Fédération mondiale des annonceurs (WFA) a fait l’effet d’une bombe : 90% des annonceurs seraient en train de reconsidérer leurs partenariats avec les agences pour l’achat de publicité programmatique. Quatre-vingt-dix pourcents ! Certes, le modèle d’achat via les agences reste le modèle dominant, mais de nombreux annonceurs l’abandonnent pour privilégier des solutions en interne afin de travailler directement avec les médias, et donc de court-circuiter les agences. Si l’étude en question a décortiqué les comportements des annonceurs, elle a aussi mis en avant un facteur positif pour les agences indépendantes, notant que 46% des annonceurs avaient aujourd’hui recours à ces dernières. Une tendance en hausse.
 
L’opacité de transactions et les frais techniques plus ou moins justifiés qui s’additionnent à des marges en cascade ponctionnées par les intermédiaires (pour un montant total qui peut friser les 70%) ont provoqué ce désamour entre annonceurs et agences. Certaines d’entre elles ont donc pris les devants, mettant en place des politiques totalement transparentes, en fournissant par exemple l’intégralité de leurs comptes et les originaux des opérations facturées aux médias. « La transparence est un enjeu majeur pour notre profession et elle n’est malheureusement pas respectée, déplore Florian Grill, PDG de CoSpirit MediaTrack. Certains de nos concurrents se font rémunérer en complément par les régies ou bénéficient d’avantages qui, in fine, ne sont pas rendus aux clients. Cela leur permet de donner l’illusion d’honoraires plus bas. » Car dans la réalité, cela coûte beaucoup plus cher aux clients. Cela dénature également le conseil média, ces agences peu scrupuleuses ayant tendance à recommander les régies qui les rémunèrent le plus. Le choix de la transparence s’annonce donc gagnant sur le long terme, d’autant que les clients semblent de moins en moins dupes de ces pratiques douteuses. « Notre métier est de vendre du conseil, précise Florian Grill. Traditionnellement, les agences média se rémunèrent au pourcentage de l’achat d’espace. Nous luttons contre cette habitude qui n’a pas de sens – chaque fois qu’on optimise un achat, la rémunération baisse ! – en proposant à nos clients de facturer sur la base du temps-homme. D’un point de vue technologique, nous sommes agnostiques. Nous n’avons pas une solution interne qu’il faut absolument vendre au client pour la rentabiliser. Notre rôle de conseil peut même consister à aider nos clients à choisir la solution idoine pour s’équiper eux-mêmes ».
 
Et ce constat n’est pas seulement franco-français, il est même partagé aux quatre coins de la planète. Martyn Rattle, PDG de Local Planet (un réseau qui réunit des agences media indépendantes issues de 58 pays, dont CoSpirit MediaTrack), renchérit : « De nombreux annonceurs sont excédés et se séparent des grandes agences avec lesquelles ils travaillent. Nous avons fait de longues recherches pour comprendre ce que ces clients voulaient et ce qui leur manquaient : tous souhaitent des alternatives aux pratiques actuelles. En particulier, ils expriment le besoin impérieux de davantage de transparence à cause de ce sentiment de défiance qui sévit dans notre industrie. La transparence doit être la pierre angulaire des relations que nous entretenons avec nos clients et de la réputation que nous bâtissons. » Les agences media jouent un rôle crucial dans l’industrie publicitaire, se passer d’elles n’est pas une solution à long terme. Elles conseillent et accompagnent les annonceurs dans la mise en place des campagnes de communication. Si les clients peuvent avoir intérêt à intégrer certains volets de la prestation, le rôle d’un conseil media avec une vue globale sur le mix media reste fondamental. Les annonceurs seuls n’ont pas les ressources pour endosser les deux rôles, ils ont aussi besoin de « sentir » que les coûts engendrés par les services intermédiaires sont justes.

Une seule option : jouer la carte de la transparence

C’est ce même sentiment d’injustice qui avait poussé le gouvernement – poussé par l’Union des annonceurs – à voter la loi Sapin en 1993, à une époque où la dérégulation du marché avait créé un climat de suspicion à cause de surcommissions aussi opaques que généralisées. L’objectif avait été d’encadrer l’épineuse question des coûts. La loi avait alors imposé un partage des rôles : les agences étaient là pour acheter les espaces pour les annonceurs, les régies les vendant pour le compte des médias, sans qu’une même entité puisse endosser les deux rôles sans en informer préalablement son client. Aujourd’hui, bis repetita à l’heure où les enjeux financiers liés au digital et à l’exploitation des données personnelles deviennent colossaux.
 
Face à cela les agences indépendantes comme CoSpirit MediaTrack sont probablement plus promptes à inventer leur propre modèle pour rassurer les annonceurs. « Nous garantissons contractuellement une totale transparence à nos clients, en échange d’une juste rémunération de notre travail, explique Delphine Medeci, directrice générale adjointe de MediaTrack. Nous privilégions des facturations sur la base du temps passés sur les dossiers plutôt que sur la base de pourcentage. Et nos clients ont également la possibilité d’auditer l’ensemble de nos comptes. » Des arguments-choc. Rendez-vous dans deux ou trois ans pour voir si cette stratégie aura atteint son objectif.






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