RSE Magazine
 
RSE Magazine
Accueil
Envoyer à un ami
Version imprimable
Partager

Le train des écoresponsabilités

François Nguilla Kooh, Stéphane Doyen
09/10/2023



Le ferroviaire n'est pas qu'un moyen de transport, c'est la clé de notre avenir écologique. Dans cet article, François Nguilla Kooh & Stéphane Doyen, co-auteurs de "Le ferroviaire : instrument de puissance" publié chez VA Éditions, nous plongent dans les enjeux actuels de la transition écologique, notamment à travers le prisme du transport ferroviaire. Les auteurs mettent en lumière les décisions politiques récentes, les défis à relever pour atteindre les objectifs de développement durable, et les leviers technologiques et économiques pour transformer le secteur. À travers une analyse approfondie, les deux experts nous invitent à réfléchir sur le rôle central du ferroviaire dans la construction d'un avenir plus vert et durable.



Le 25 Septembre 2023, au terme du Conseil de planification écologique, le président de la République Française, présentait la future feuille de route pour tenir l’objectif de réduction des gaz à effet de serre de 55 % à l'horizon 2030 par rapport à 1990. Une des mesures phares et qui est un des volets du plan de relance annoncé en février, concernait les transports verts et un abondement de 700 millions d’€ pour la construction de treize RER dans dix métropoles françaises. Cette annonce amorce la matérialisation de celle faite en Février 2023. La France par la voix de sa première Ministre lançait un plan de 100 Milliards d’€ jusqu’en 2040 (1) pour rendre les mobilités éco-responsables et en l’occurrence par le rail. Certains observateurs estiment que ce plan n’est pas à la hauteur de l’urgence de la transition écologique. Par ailleurs, l’ambition de doubler la part modale du train en 2030 et donner un véritable coup de boost à la Loi d’Orientation de Mobilités (LOM) de décembre 2019 alors qu’il est envisagé une très forte augmentation des prix des péages ferroviaires comme l’indiquaient des sénateurs français en juillet 2022 (2) questionne.
 

Objectifs de Développement Durables, où en sommes-nous ?

En 2020, le transport routier représentait 94,7% des émissions de gaz à effet de serre. Au niveau mondial le transport de marchandises par la route ne représente que 18% contre 70% pour le fluvial, 2% par avion et 9% pour le rail (notamment en raison de la place du fret ferroviaire aux Etats-Unis). En 2015, lors du Forum International du Transport (ITF), le développement de systèmes de transport efficaces dont ont besoin le commerce et le tourisme, était identifié comme l’un des ODD (Objectif de Développement Durable) de l’Agenda 2030 des Nations Unies. Le triplement des volumes du transport respectivement des marchandises et celui des personnes d’ici 2050 au regard des tendances actuelles de la demande ainsi que l'essor de l'Asie et de l'Afrique stimuleront la demande de transport de marchandises. Si des ruptures en termes de mobilités ne sont pas opérées, les émissions en CO2 augmenteront de plus 60%. A mi-parcours de l’agenda 2030 des ODD, on n’en est qu’à 15% des indicateurs qui sont sur la bonne voie et seulement 11% des français qui ont connaissance de ces ODD. Il y a donc encore pas mal de pain sur la planche et coté transport ferroviaire les tendances ne sont pas encore rassurantes.

Pourtant, les arguments ne manquent pas pour faire du train de tous les modes de transports, le moyen de transport à privilégier en toute première intention. L’efficacité économique en termes de consommation énergétique du train est remarquable. Le train n’émet que 1 à 2 % de CO2. Pour 1km parcouru par passager, un train classique, consomme entre 60 et 100 Wh, le bus consomme entre 80 et 400 Wh et l’avion entre 360 et 450 Wh. 500€ c’est la facture à payer pour l’énergie consommée par un TGV à deux niveaux pouvant transporter sur 900km entre 400 et 600 personnes.  Ce coût correspond à la consommation pour une distance équivalente de 3 à 4 voitures ne pouvant transporter que jusqu’à 20 personnes. Même si comparée à l’avion la consommation énergétique du TGV semble de premier abord élevée (20KWh/km), la proximité des gares des centres-villes, permet de s’affranchir dans bien de cas du déplacement en voiture pour rejoindre les points de départs et d’arrivée des aéroports. Mais, il faut une politique de maillage des territoires à hauteur des enjeux. De même, il faudrait des offres adaptées à l’environnement géographique et socio-économique.

Des leviers pour des transformations éco-responsables

Comment faire du chemin de fer le symbole de la révolution des mobilités au XXIe siècle comme ce fut le cas lors de la révolution industrielle en Europe au XIXe siècle (3). Comment le rendre plus compétitif et mieux intégré aux autres formes de transport (plus de multimodalités et de service porte-à-porte) ? L’ouvrage « Le Ferroviaire, instrument de puissance » (4), apporte quelques éléments de réponse.  

L’exploitation des opportunités offertes par les nouvelles technologies, de l’IA, couplée à l’utilisation de l’énergie solaire, de l’hydrogène, des batteries, la réutilisation de l’énergie de freinage, le développement de la filière d’économie circulaire, et des ruptures dans les modes de gouvernance vont concrètement contribuer à la sobriété et à l’optimisation énergétique. Ces fondamentaux vont sans doute, inscrire durablement le ferroviaire dans une industrie et une économie performante et écoresponsable irrigant tous les écosystèmes des territoires que le train traverse.

Il n’en demeure pas moins que la filière doit faire à face au pseudo-dilemme entre la nécessité de production des énergies vertes (batteries ou à base d’hydrogène), de la construction des lignes de chemin de fer et l’impact écologique qu’elle doit impérieusement minimiser. Elle doit surtout mettre en balance les bénéfices pour les populations. Entre déséquilibre des écosystèmes naturels et la prédation de l’extractivisme lié aux minerais indispensables aux batteries pour une mobilité décarbonée, les scandales ne sont pas légion. Celui de l’extraction du cobalt en République Démocratique du Congo en est un exemple parmi tant d’autres. Pour paraphraser le jeune de 9 ans de la dernière campagne (5) d’une grande compagnie de chemin de fer en France (6), il est temps de dire quel écolo-responsable sera le train demain ?

[1] https://www.transition-europe.eu/fr/news/le-plan-de-relance-ferroviaire-de-100-milliards-deuros-une-reponse-suffisante-aux-enjeux-de-la
[2] https://www.senat.fr/leg/exposes-des-motifs/ppl21-834-expose.html
[3]  Alain Picard, Alexander Doll, Le train est la solution pour une croissance durable en Europe [28 juin 2019]. lesechos.fr/idees-debats/cercle/le-train-est-la-solution-pour-une-croissance-durable-en-europe-1034013
[4] De François Nguilla Kooh & Stéphane Doyen, VA Editions, Juin 2023 - https://www.va-editions.fr/le-ferroviaire-instrument-de-puissance-c2x39965996
[5] https://youtu.be/78MFURT68M0
[6] SNCF a été classé première compagnie de transport et dans le top 5 du classement mondial des entreprises en matière de responsabilité sociétale et environnementale (RSE) en 2021





Nouveau commentaire :
Facebook Twitter