La livraison du dernier kilomètre fait sa révolution écologique

11/09/2020


Dans un contexte d’explosion des livraisons de colis tirée par la forte croissance de la vente à distance, les opérateurs cherchent à réinventer les modes de livraison du dernier kilomètre dans l’objectif d’atteindre la neutralité carbone, de réduire l’impact sur les villes et de rendre leurs activités plus durables. Parmi les solutions mises en place, le développement de flottes de véhicules plus propres et la mutualisation des livraisons de marchandises en centre-ville comme le propose déjà Urby, la filiale de logistique urbaine de La Poste.



Maillon le plus coûteux mais aussi le plus stratégique de la supply chain, le dernier kilomètre en ville concentre plus que jamais toutes les attentions des opérateurs de livraison. Car la crise sanitaire n’a pas démenti la croissance tendancielle du commerce en ligne, bien au contraire. Celle-ci a montré les perspectives de développement du e-commerce, notamment dans l’alimentaire et la grande consommation, où celui-ci était jusqu’à présent encore embryonnaire au regard de ses potentialités.

Mais la forte croissance de la livraison à domicile, solution préférée des Français à 85%, n'est pas sans conséquences. Celle-ci se traduit par une hausse du trafic de véhicules en ville, pouvant se traduire par des impacts négatifs en matière de circulation, de nuisances sonores ou encore de qualité de l'air. Les 10 millions de livraisons ou enlèvements réalisés chaque jour en France en zone urbaine représentent ainsi déjà plus de 20% des véhicules circulant en villes, à eux seuls responsables de 30% des émissions de CO2 et de 40% des émissions de particules. L’objectif pour les acteurs de la livraison n’est donc plus seulement de livrer vite et bien des volumes de plus en plus importants, mais aussi d’assurer la durabilité de leurs activités sur le long terme.

Limiter les nuisances sonores et les émissions de gaz à effet de serre

Parmi leurs principaux enjeux, la limitation des nuisances sonores et de la pollution atmosphérique liées au transport s’impose plus que jamais comme un chantier prioritaire, notamment avec la mise en œuvre prochaine des zones à faible émission mobilité (ZFEM) dans les centres villes. L’évolution des modes de livraisons représente également une forme de réponse au problème de la congestion des voies de circulation dans les grandes agglomérations, qui constitue un frein à l’augmentation des volumes d’articles livrés.

Pour minimiser l’impact environnemental du dernier kilomètre et s’adapter à ces nouveaux enjeux, les acteurs de la logistique se sont engagés dans une vaste refonte de leurs modes de la livraison en adoptant différentes stratégies. Première réponse apportée au problème : le recours aux moyens de mobilité doux, vélos cargos, véhicules électriques et roulant au gaz naturel de ville (GNV), qui permettent de lutter concrètement contre les émissions de particules fines dans les villes, et de contourner le problème des embouteillages. Une solution notamment adoptée par le transporteur XPO Logistics, qui a passé en 2019 une partie de sa flotte française au GNV ou au gaz naturel comprimé. Même démarche chez Chronopost qui, depuis juillet 2019, livre tout Paris avec une centaine de véhicules 100% propres, électriques ou au GNV.

Mutualiser les réseaux de livraison du dernier kilomètre : l’exemple d’Urby (La Poste)

Le deuxième levier consiste à optimiser les déplacements au sein des agglomérations via notamment la mutualisation des réseaux de distribution entre les acteurs de la chaîne logistique pour gagner en efficacité. Cette stratégie est suivie par le premier d’entre eux, le groupe La Poste, leader de la distribution de colis à domicile. Le 2 juillet dernier, le groupe dirigé par Philippe Wahl, a annoncé une augmentation du capital de la société Urby, sa filiale dédiée à la logistique urbaine, menée avec la Caisse des dépôts, via la Banque des Territoires. Une opération visant à accélérer le développement d’Urby en prévision de la mise en place prochaine dans les centres villes des zones à faible émission mobilité (ZFEM).

Créée en 2017, Urby crée des centres de mutualisation en périphérie des villes pour les différents acteurs de la chaîne logistique : transporteurs, messagers, expressistes et chargeurs. Au sein de ces entrepôts, la filiale du groupe La Poste collecte et stocke les marchandises et organise depuis ses sites les livraisons en cœur de ville grâce à des véhicules à faible émission. Déjà présente dans 17 métropoles telles que Bordeaux, Lille ou Lyon, la jeune entreprise ambitionne dès 2021 de travailler avec toutes les métropoles de France pour développer des services de proximité, de réassort, stockage et livraisons pour les particuliers, les entreprises et les collectivités.

Optimiser la préparation des commandes et les tournées de livraison

Outre la réinvention des modes de livraison, les opérateurs misent également sur un recours plus important aux nouvelles technologies. Celui-ci passe tout d’abord par la robotisation des entrepôts afin d’optimiser la préparation des commandes et les tournées de livraison, à l’instar du lancement en mars dernier du premier entrepôt automatisé du groupe Casino intégrant la technologie d’Ocado. Les logisticiens se tournent aussi vers l'intelligence artificielle pour optimiserl'organisation de la chaîne logistique. Alors que 24% des camions de livraison roulent à vide selon une étude de 2018, le recours à des algorithmes doit permettre d’optimiser les tournées de livraison et les étapes de chargement. En intégrant les données de circulation et les informations fournies par les opérateurs de livraison, la solution proposée par Probayes, spécialiste de l’intelligence artificielle et de la data science, filiale du groupe La Poste, permet, par exemple, d’améliorer les parcours de livraison et de réduire les émissions de CO2.

En juin dernier, la jeune entreprise Sightness a annoncé compléter sa solution de détection des anomalies de transport, avec une fonctionnalité de tracing enrichie par machine learning. Un nouveau service qui doit permettre aux transporteurs de limiter encore plus les temps morts et les retards éventuels lors de leurs tournées de livraison. Et ainsi le gaspillage de ressources et l’émission de gaz à effet de serre.

Complémentaires, ces différents leviers représentent autant de moyens pour les acteurs de la chaîne logistique et de livraison pour limiter l’impact environnemental de la hausse de leurs activités. Un enjeu qui devient par ailleurs de plus en plus essentiel à l’heure où les consommateurs sont de plus soucieux des conséquences environnementales de leur consommation en ligne.