Efficacité énergétique: les barrières économiques et sociales

RSE Magazine
11/10/2009


Les énergies renouvelables satisfont aujourd’hui 18% de la demande d’énergie, dont 15% par l’hydraulique et la biomasse. On estime qu’en l’espace de dix ans, le coût de l’électricité solaire a baissé de 60%. Mieux encore, les progrès de l’énergie éolienne ont fait chuter son coût de 80% entre 1980 et 2007. Il existe encore pourtant des freins au développement des énergies propres. Quels sont-ils ?



Déficit de rendement ou problème d’acceptabilité ?

C’est en 1973, au moment du premier choc pétrolier, que les gouvernements des pays importateurs de pétrole ont pris conscience de la contrainte en matière d’approvisionnement énergétique. Depuis, les relations géopolitiques et les enjeux environnementaux corroborent l’impératif d’un mode alternatif de production d’énergie. D’ailleurs, si on observe l’évolution de l’intensité énergétique dans les pays industrialisés (c’est-à-dire la consommation d’énergie primaire par unité de PNB), on s’aperçoit qu’elle a décru en moyenne de 1 à 2% par an.

Satisfaisant, certes. Suffisant, sûrement pas ! Cette sobriété toute relative ne signifie pas que le potentiel de réduction de consommation offert par les technologies actuelles est pleinement exploité… Le Livre Vert de la Commission Européenne fixe pour ambition communautaire une réduction de 20% de l’intensité énergétique d’ici 2020. Or on estime que le simple fait de mettre en œuvre des mesures déjà décidées permettrait d’atteindre aujourd’hui… la moitié de cet objectif !

Le potentiel d’amélioration de l’efficacité énergétique continue de croître grâce à la R&D et à la convergence technologique (biotechnologies et nanotechnologies au service du développement durable par exemple). Seulement, les entreprises et les ménages laissent échapper bien des opportunités de réduire leur empreinte écologique et de réduire leur consommation sur le moyen/long terme. Les chercheurs en sciences humaines et sociales sont donc de plus en plus nombreux à se pencher sur le problématique des « barrières à l’efficacité énergétique ». En d’autres termes, pourquoi notre société rechigne-t-elle à s’approprier le progrès technique dans ce domaine ?

Un large consensus se dégage en matière d’analyse technico-économique : le potentiel de réduction de la consommation et des coûts énergétiques est considérable. Par contre, les entreprises et les ménages n’investissent pas suffisamment. L’une des raisons majeures en est que le temps de retour sur investissement dépasse des limites considérées comme acceptables, à plus forte raison en période de crise.


Quelles sont les principales barrières à l’efficacité énergétique ?

Des facteurs socioéconomiques

Le développement des nouvelles technologies énergétiques est désormais maîtrisé. Les seuils de rentabilité économique et de rendement énergétique sont atteints, reste-t-il tout au plus à travailler à leur amélioration. Il apparaît en fait que la résolution de la problématique énergétique est principalement freinée par des facteurs socioéconomiques, que l’on peut résumer comme suit :

- Le financement du surcoût des installations, malgré l’instauration des crédits d’impôt, est onéreux pour les entreprises et souvent inaccessible pour les ménages ;
- Si le rendement énergétique est satisfaisant, il persiste des difficultés techniques liées à l’intermittence de fonctionnement de certaines installations, entravant de ce fait la garantie de puissance ;
- L’acceptabilité sociale de ces technologies n’est pas encore optimale, du fait que l’usager trouve un service équivalent à travers le réseau de distribution d’électricité ;
- Il existe un déficit d’information sur les coûts d’entretien des installations ;
- Il y a donc un problème d’incitation à l’adoption des énergies renouvelables. Par conséquent, la demande solvable étant restreinte, la progression de l’offre est bridée.

Des contraintes organisationnelles fortes

Un autre frein majeur au développement des énergies renouvelables réside dans l’impératif d’intégration de la puissance produite par les grands énergéticiens, qui doivent :

- planifier la capacité d’absorption et de redistribution du réseau
- intégrer l’incidence technique des grandes puissances (équilibrage et gestion des creux notamment)
- répondre à des impératifs de compétitivité


En conclusion, les technologies énergétiques durables existent, s’améliorent sans cesse, et le seuil de rentabilité de l’investissement est atteint de plus en plus tôt. Les deux principales barrières à l’efficacité énergétique ne sont donc pas techniques. La première est d’ordre organisationnel : les énergéticiens doivent intégrer à leur réseau les modes de production d’énergie décentralisés, ce qui s’avère souvent complexe. La seconde barrière relève d’un manque de volonté politique : les mécanismes d’incitation à l’investissement dans les énergies renouvelables ne sont pas tout à fait adaptés à la situation économique actuelle des entreprises et des ménages…


Pour aller plus loin
Boulanger P.-M., Les barrières à l’efficacité énergétique, Reflets et perspectives de la vie économique 2007/4, Tome XLVI, p. 49-62.
www.ademe.fr
www.econoler.com


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