Les communautés ancestrales du Brésil ont-elles un droit particulier sur leurs territoires historiques au Brésil ? Les enjeux politiques et sociaux se sont largement déplacés sur le volet juridique. Raison pour laquelle la décision de la Cour de justice du pays est importante. « Une petite communauté d'Indiens brésiliens a gagné une action en justice pour leurs droits territoriaux devant la Cour suprême du Brésil, ce qui pourrait avoir des répercussions majeures pour les Autochtones dans l'ensemble du pays. La Cour a décidé qu'une décision judiciaire de 2014 annulant la restitution d'une partie de leur territoire ancestral à la communauté guarani de Guyra Roka doit être réexaminée, car les Guarani eux-mêmes n'ont pas été impliqués dans le processus. Désormais ils doivent bénéficier d'une audience équitable avant que la Cour ne statue à nouveau sur la restitution de leur territoire » affirme Survival, une ONG engagée sur le sujet.
« Cependant, il est peu probable que les Guarani récupèrent rapidement leurs terres. La majeure partie de la région a été accaparée par un puissant politicien et éleveur, José Teixeira, qui a été impliqué dans une série d'attaques contre les Guarani. L'un des leaders de Guyra Roka, Ambrosio Vilhalva, qui a joué dans le long métrage La terre des hommes rouges, a été poignardé à mort en 2013. Vilhalva et d'autres ont mené une "réoccupation" en 2000 pour reprendre une petite parcelle de leurs terres à l'éleveur » rappelle l’association militante.
La discussion légale autour des droits des autochtones sur des territoires repose sur la règle retenue par l’État qui estime que les terres reconnues comme celles des communautés sont celles sur lesquelles ils vivaient lors de l’adoption de la Constitution brésilienne en 1988. Un principe que dénoncent les militants. « La Cour suprême doit se prononcer prochainement dans une autre affaire concernant le peuple xokleng, qui constituera le précédent définitif pour le cadre temporel. S’il est confirmé dans cette affaire, les droits autochtones seront ramenés des décennies en arrière et de nombreux peuples autochtones, ainsi que leurs terres, pourraient être détruits. » s’alarme Survival.
Un œil sur le processus législatif, l’autre sur l’épidémie de Covid-19 : les populations autochtones de la forêt amazonienne sont dans une situation préoccupante. « Selon la COIAB, l'organisme de coordination des organisations autochtones de l'Amazonie brésilienne, le taux de mortalité des autochtones de la région amazonienne est incroyablement supérieur de 58 % à celui de la population générale, tandis que le taux d'infection est supérieur de 68 %. La ville amazonienne de Manaus - qui abrite environ 30 000 autochtones - a été gravement touchée, et l'aide d'urgence pour les zones plus éloignées des hôpitaux reste particulièrement précaire. Lorsque le virus atteint les communautés autochtones de la forêt - en particulier les territoires des peuples récemment contactés et non contactés - les résultats peuvent être dévastateurs. De nombreux territoires de peuples non contactés ont déjà été envahis par des bûcherons, des mineurs et des colons » rapporte l’organisation Survival.
Revenant sur les premières positions du président Jair Bolsonaro concernant l’épidémie de Covid-19, le communiqué de l’organisation militante souligne le peu d’attention réservées aux populations autochtones : « La liste des politiques anti-autochtones de Jair Bolsonaro est bien documentée et semble s'apparenter à un génocide contre les premiers peuples du Brésil. Ayant récemment gagné le contrôle des deux chambres du Congrès brésilien, le président brésilien a exposé ses priorités en essayant de faire passer un projet de loi controversé sur l'exploitation minière, qui contribuerait à l'élimination des droits autochtones au Brésil. Alors que les programmes de vaccination ont commencé à se déployer dans tout le pays, en décembre 2020, l'Agence brésilienne des affaires autochtones (FUNAI) n'avait dépensé que 52 % de son budget pour lutter contre la pandémie, selon l'APIB. » Isolés mais pas assez pour ne pas être concernés par la pandémie, la double peine des amérindiens ajoute aux difficultés de ces populations originaires de l’Amazonie.