Le traitement du bois de construction : un danger pour la santé

La rédaction
10/08/2018


Sensible au feu, à l’eau, aux insectes et aux champignons, le bois doit subir divers traitements chimiques avant d’être utilisé dans la construction. Mais les produits employés peuvent présenter certains dangers pour la qualité de l’air intérieur et pour la santé...



Une fois coupé, le bois est un matériau qui perd nombre de ses caractéristiques naturelles. Parce qu’il est un matériau issu du végétal, contenant notamment de la cellulose et de la lignine, il se montre à la fois très combustible, particulièrement sensible à l’humidité, et vulnérable aux attaques de nombreux micro-organismes, champignons, bactéries et insectes. Les champignons lignivores, les insectes xylophages et autres termites, qui prolifèrent sur ce matériau dans des conditions humides, peuvent même détruire le squelette du bois (en causant des pourritures ou en creusant des galeries) et donc fortement altérer les propriétés mécaniques du matériau et la solidité de la structure.
 
Pour être protégé contre toutes ces menaces, le bois de construction doit donc subir des applications de fongicides et d’insecticides, qui s’ajoutent aux divers traitements chimiques nécessaires contre le feu, contre l’humidité, et pour améliorer la durabilité ou la facilité d’entretien. Autant de produits chimiques qui sont susceptibles de présenter certains dangers pour l’air intérieur des maisons et pour la santé de leurs habitants, en particulier à cause des composés organiques volatils (COV) qu’ils peuvent contenir.
 
A toutes ces substances, s’ajoutent également les colles et les résines, utilisées pour assembler les panneaux de bois (placages, contreplaqués, agglomérés, lamellés-collés, etc.), qui comptent également parmi les principaux émetteurs potentiels de COV… Tout comme les produits de finition : peintures, vernis, lasures, cires synthétiques…
 
Pour toutes ces raisons, les panneaux de bois reconstitués (agglomérés) figurent parmi les principaux matériaux de construction émetteurs de COV identifiés par l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail), au même titre que le bois de charpente et les planchers, les peintures, les vernis, les mousses isolantes, les moquettes ou les revêtements de sols. D’autant que le bois émet déjà, naturellement, des composés organiques volatils, en particulier du formaldéhyde et des terpènes, qui donnent au bois fraîchement coupé son odeur caractéristique.
 
Les COV dans le collimateur
 
Ces composés organiques volatils (COV) ont la capacité de s’évaporer à la température ambiante et de se répandre dans l’air, provoquant des effets néfastes sur la santé : irritations de la peau, des muqueuses ou du tractus respiratoire, nausées, céphalées... Certains COV sont même classés, selon l’Anses, « cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction ».
 
Or, selon une étude menée sur près de six cents habitations représentatives du parc de résidences français par l’Observatoire de la qualité de l’air intérieur (OQAI), on trouve des COV dans 100 % des logements. 10% d’entre eux sont même qualifiés de « multi-pollués » car ils présentent trois à huit des COV mesurés à de fortes concentrations, 15% sont « pollués » (un à deux composés présents à de fortes concentrations), et 30% « légèrement pollués » (quatre à sept composés présents à des concentrations supérieures aux médianes de l’ensemble des logements). Seuls 45% des logements sont considérés comme « peu pollués ».
 
Principaux composés identifiés : le formaldéhyde, l’hexaldéhyde, le toluène et l’acétaldéhyde, qui sont mesurés à des concentrations nettement supérieures à l’intérieur des habitations (notamment en bois) qu’à l’extérieur. Selon l’Anses, ces sources de pollution intérieure sont constituées par les occupants et leurs activités (fumée de tabac, combustion de bois ou de charbon, cuisine, bricolage, utilisation de produits d’entretien ou de désodorisants) d’une part, et par les produits de construction, de décoration, d’ameublement et de bureautique d’autre part.
 
C’est pourquoi, depuis le 1er janvier 2012, la réglementation française impose une étiquette pour classer les matériaux de construction et de décoration en fonction du taux de composés organiques volatils qu’ils émettent – de A+ (très faibles émissions) à C (fortes émissions).
 
Selon l’Anses, les émissions de COV peuvent aller d’une pollution ponctuelle lors de l’utilisation d’un produit ou d’une activité particulière à une pollution à long terme lorsque les COV sont émis sur plusieurs années par certains matériaux de construction. Les effets potentiels sur la santé humaine des COV peuvent par conséquent être « aigus » s’ils sont liés à une exposition sur une courte période ou « chroniques » s’ils sont liés à une exposition continue sur une longue durée. Par ailleurs, si les effets de certains COV étudiés individuellement sont bien étudiés, leurs effets combinés dans le cas d’une exposition simultanée restent souvent méconnus.
 
Favorisant l’émergence de symptômes tels que maux de tête, fatigue, irritation des yeux, du nez, de la gorge et de la peau, vertiges, ainsi que des manifestations allergiques et de l’asthme, les expositions de longue durée à certains polluants peuvent même entraîner des pathologies respiratoires, neurologiques ou cardio-vasculaires graves, voire le développement de cancers. Les enjeux sanitaires et économiques liés à la qualité de l’air intérieur sont donc majeurs. Au-delà de l’impact sur la santé humaine, l’Anses a ainsi estimé à 19 milliards d’euros par an le coût de la mauvaise qualité de l’air intérieur. Les maisons en bois ne sont donc pas si bonnes pour l’environnement et la santé que l’on veut bien le dire.