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La propriété intellectuelle peut-elle garantir un avenir durable?

22/08/2013





Concept de brevetabilité, une entrave à l’innovation
Le monopole qui accompagne les droits de propriété intellectuelle suscite automatiquement les discussions. Si la privatisation des connaissances identifie plusieurs gagnants, les échanges restent en effet l’un des principaux moyens pour faire avancer les recherches. De nombreux acteurs tentent ainsi de restaurer cet esprit de partage dans le domaine du savoir. Les références ne manquent en effet sûrement pas, témoignant de l’importance des échanges dans l’innovation.
 
La publication immédiate des résultats reste l’un des premiers moyens de lutte contre l’appropriation. Rendues publiques, les données ne peuvent plus faire l’objet d’un brevet, écartant ainsi la privatisation des connaissances. Le Human Genome Project constitue un exemple concret de l’efficacité de ce concept de partage. Les données ont été publiées au fur et à mesure des découvertes, ayant ainsi permis de les vérifier et de les comparer. Les connaissances sont partagées entre les chercheurs, dont le travail se retrouve automatiquement alimenté. Ayant regroupé les savoirs de nombreux acteurs, ce projet de séquençage du génome humain, réalisé en 14 ans (de 1990 à 2004), constitue une référence en termes d’échanges et de coopération. L’un des éléments essentiels au développement.
 
Dans ce contexte de partage, la Commission européenne a également établi un projet portant sur la publication des résultats, dans le cadre des recherches appuyées par l’Union européenne. Il s’agit d’une requête dont l’application permet au public un accès aux résultats. Les données scientifiques sont les premières concernées par cette publication ouverte, qui, à noter, n’est pas obligatoire, et ne porte pas sur les informations brutes. Selon l’ancien commissaire responsable de la science et de la recherche, Janez Potocnik, ce projet initié par la Commission européenne est essentiel à la « réalisation de la ‘’Cinquième liberté’’, le mouvement gratuit de la connaissance entre les États membres, les chercheurs et le grand public ».
 
Question de propriété… les alternatives
Ceci étant, la concrétisation d’un tel projet reste sujette à de nombreuses questions. Notamment en ce qui concerne les droits de propriété et les contrats entre sociétés privées et établissements de recherches publics. La publication des résultats des recherches s’accompagne en effet de quelques soucis de propriété. Pour de nombreuses personnes, les découvertes des universités ou autres institutions publiques ne devraient pas être brevetées par un laboratoire privé qui, à son tour, profiterait alors d’une exclusivité de 20 ans. Des mises au point devraient ainsi être effectuées en ce qui concerne les licences d’exploitation. Si l’on se réfère au concept de partage, ces dernières devraient être équitables, accordées entre autres à une entreprise privée, mais également à d’autres institutions de recherches afin de donner aux pays en voie de développement l’accès aux inventions.
 
Dans cette quête de liberté et d’accès, certains acteurs avancent la mise en place d’un système de brevets plus souple, dans l’optique d’une meilleure ouverture des recherches. Les connaissances sont alors rassemblées et liées à un pool de brevets, permettant ainsi un décloisonnement des investigations, une porte beaucoup plus ouverte pour les pays en besoin. Pour d’autres, la meilleure alternative reste la rétribution des inventions, directement en fonction de leurs nécessités sociales, économiques et scientifiques. Des solutions dont la réalisation reste pourtant dépendante de plusieurs facteurs.
 
Le Sud exclu
Les recherches forment incontestablement les premiers piliers du développement. Les richesses sont les fruits des études réalisées. La production d’informations constitue la source même de toutes les étapes de croissance. Le monde capitaliste représente l’une des premières références dans ce contexte. Les recherches, privées comme publiques, garantissent l’avancé de chaque secteur, donnant naissance à des marchés à évolution quasi permanente.
 
Ceci étant, les recherches impliquent des moyens, tant matériels qu’intellectuels. Et si les pays du Nord se retrouvent au cœur de ce concept, où les informations sont au premier rang, les territoires du Sud semblent tenus à l’écart. Jusque-là, ces derniers se retrouvent en effet très loin des pays avancés en termes de recherches. La diffusion des informations, s’il y en a, reste lente, ne permettant pas aux différents acteurs, dont les universités, chercheurs, étudiants, professeurs, écoles, d’avancer en termes de technologie. L’accès aux découvertes du Nord est souvent en attente, pratiquement insaisissable. Il est pourtant impossible pour les pays du Sud d’atteindre une certaine croissance tant que les informations sont cloisonnées. Le concept de brevetabilité reste l’une des premières explications à ce phénomène de non-partage. Dans le Nord, les acteurs se ruent dans une course aux brevets pour obtenir l’exclusivité, tandis que les pays du Sud ne disposent même pas de moyens pour réaliser les recherches. Le développement tant attendu doit pourtant passer par une coopération internationale. Et si les pays avancés sont particulièrement centrés sur les moyens de gagner encore plus de marchés, les autres nations tentent désespérément d’améliorer leurs réalités.
 
Par exemple, dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique, de nombreux pays demeurent à l’écart des projets, faute de moyens. Ils ne peuvent prendre part aux recherches, et automatiquement, n’ont pas accès aux technologies adéquates à leurs besoins. La croissance elle-même devient ainsi brevetée.
 
Lorsque l’on parle d’équilibre et d’équité, le Nord et le Sud se retrouvent à deux extrémités. Il est indéniable que les écarts économiques et sociaux entre les deux territoires sont largement élevés. Et ce, tout simplement à cause du non-partage. Le concept de propriété intellectuelle revient automatiquement au cœur du débat, ne pouvant s’écarter du terme « cloisonnement ». Les brevets restent en effet l’une des entraves aux échanges, donc également à l’innovation. Et si de nombreux projets sont portés sur des stratégies de croissance dans plusieurs pays, le souci se situe surtout au niveau des conditions de production et d’invention, pourtant essentielles aux développements et recherches.