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La démocratie à l’heure de « l’Europe-aquarium » et du « citoyen-poisson rouge »

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07/04/2014



C’est la même situation que vit le citoyen européen dans une Europe où l’Etat-néolibéral est considéré comme la forme indépassable de l’organisation collective, la démocratie représentative comme l’alpha et l’oméga de la gouvernance, et le capitalisme comme le seul système économique viable. Ses choix de société ne peuvent se faire qu’au sein de ces certitudes organisationnelles et institutionnelles. Son destin est donc le même que celui d’un poisson rouge dans un aquarium, car réduit à tourner éternellement en rond de haut en bas au sein de l’Etat-néolibéral, à pivoter de gauche à droite dans l’alternance démocratique ou à se prononcer sur plus ou moins d’interventionnisme au sein du capitalisme néolibéral.



La démocratie à l’heure de « l’Europe-aquarium » et du « citoyen-poisson rouge »
Par Thierry Amougou, Professeur à l'Université catholique de Louvain

Ne sommes-nous pas, en tant que citoyens européens, à l’intérieur d’un enclos de certitudes et de vérités institutionnelles par rapport auxquelles le vote, la critique et l’innovation ne peuvent être que réformistes et donc en deçà de la promesse démocratique parce que très souvent exogènes aux sociétés et résultantes d’un système institutionnel, politique et économique surplombant nos choix ?
 
Ce questionnement traduit quelque chose comme une enclosure mythologique du monde en prenant le mythe au sens que lui donne Roland Barthes à savoir une contingence historique que l’on fonde naturellement et éternellement. Un monde dont le destin serait déjà connu dans une sorte de « fin de l’histoire » dont parlais le politologue Francis Fukuyama n’est-il pas un monde dans une enclosure mythologique qui limite les possibles, borne la critique, signale des zones interdites à celle-ci et l’utilise pour se perpétuer ad vitam aeternam en oubliant son caractère contingent, car historique ? Le citoyen européen peut-il être autre chose qu’un poisson rouge sachant que ses choix ne peuvent se faire que dans « un monde-aquarium » ?

Il semble fondé, au regard des dernières élections municipales françaises, de se demander s’il ne faut pas penser à un au-delà de la démocratie représentative et du capitalisme néolibéral. Un exemple illustre l’urgence d’une telle réflexion : au sein de l’UE, les experts, les agences de notation et les économistes néoclassiques ont déjà fait le choix de l’austérité comme la seule politique économique viable, valide et valable pour sortir de la crise économique. En conséquence, qu’un pays européen ait à sa tête un pouvoir de droite ou un pouvoir de gauche ne change rien à la politique économique qui sera menée.
 
Il en résulte un questionnement sur ce à quoi servent les citoyens et les politiques si, d’un côté, les choix des citoyens ne valent rien devant ceux des bureaux d’expertise et si, de l’autre, les politiques n’ont désormais plus pour seule et unique fonction qu’appliquer et/ou mettre en scène ce qui aura été au préalable décidé dans les coulisses de l’expertise et de la doxa économique dominante. Autrement dit, une fois que « les Grands Électeurs » (experts, commission européenne, agence de notation, économistes néolibéraux) ont tablé sur les orientations de l’UE (l’aquarium), « les petits électeurs » (les citoyens européens ordinaires) ne deviennent-ils pas que des petits poissons rouges pouvant voter à gauche ou à droite de l’échiquier politique sans que cela ne change « l’aquarium-Europe » d’un iota ?






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