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Entretien avec Eric Vallée, président de SET Environnement

« Le périmètre des métiers de la dépollution dépasse le problème de l'amiante »

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22/08/2014





Quelles sont les « tâches » les plus délicates ?

Le plus complexe dans nos chantiers, ce n’est pas tellement le type de polluant que nous affrontons, car nous prenons a priori la posture de protection la plus élevée possible, mais plutôt la configuration des chantiers : chacun est unique et certains se déroulent en parallèle de l’activité des lieux, maintenue malgré le chantier. Chaque chantier est un prototype qui a un vécu et une histoire spécifiques. Ce sont à chaque fois de nouvelles contraintes, à l’intérieur ou à l’extérieur du bâtiment, auxquelles il faut s’adapter, à plus forte raison si le site continue d’être occupé.

Maintenir les lieux en activité à proximité immédiate d’un chantier est certainement ce qu’il y a de plus exigeant. Il va de soi que dans le cas d’une pollution radioactive, le bâtiment sera évacué. Mais dans le cas par exemple du désamiantage d’un hôpital, il n’est souvent pas possible de fermer la totalité du site. Il est de notre compétence alors de cloisonner hermétiquement les zones dans lesquelles nous allons intervenir. Le même cas de figure peut se présenter dans le cas d’un centre commercial : les enjeux économiques sont souvent beaucoup trop forts pour fermer l’intégralité du site durant les travaux. Les travaux de désamiantage n’ont pas vocation à détruire ou pénaliser l’activité économique. C’est pour ces cas de figures que nous avons développé une expertise particulière en matière de dépollution de sites en activité. 

Etes-vous dépendant des évolutions technologiques dans vos métiers ?

Nous avons une obligation de résultat, ce qui signifie que nous sommes en permanence tenus de nous adapter à l’évolution des connaissances et des techniques. Les techniques de détection des particules dans l’air ou des matériaux amiantés évoluent. Si la recherche médicale progresse également, nous n’en sommes pas moins de plus en plus exigeants sur les seuils d’exposition à ne pas dépasser.

En tant que dirigeant, je dois m’assurer de garantir à mes salariés une exposition minimale aux risques. Cela signifie des investissements matériels conséquents et des charges importantes en termes de contrôles et de suivi. Nous assurons avec la même rigueur le suivi du personnel et celui du matériel protégeant nos salariés.

Nous sommes un métier de bâtiment et un métier de sécurité, ce qui implique énormément de contrôles. Et la tendance ne fera que s’accentuer, car si le progrès technique nous permet de réaliser des chantiers de plus en plus complexes, il nous pousse aussi à être bien plus précis dans l’accomplissement des tâches.

La dépollution est une filière encore en maturation. Sur quels critères objectifs peuvent aujourd’hui se différencier ses acteurs ?

Une séparation assez nette peut se faire entre les entreprises qui ont compris que la valeur ajoutée se situait sur les garanties de sécurité pour les salariés comme pour le public et l’environnement, et les autres.

Sur les 500 ou 600 acteurs de la filière du désamiantage, une partie est constituée d’intervenants de très petite taille. Ils sont entrés sur ce marché par opportunité ou par obligation découlant d’une autre activité : par exemple un couvreur chargé de retirer un toit en amiante, pour poser un nouveau toit, peut être tenté de s’improviser désamianteur, alors que ce n’est pas son premier métier. A l’inverse, nous sommes des professionnels de l’amiante et de la gestion des risques liés. Nous avons une technicité très forte, et nous avons placé notre valeur ajoutée dans la préparation des chantiers, dans l’évaluation des risques, dans la qualité de la prestation et dans la sécurité de tous les acteurs.

Au-delà de la certification que détiennent toutes les entreprises intervenant dans le désamiantage, nous avons à notre niveau opté pour un label supplémentaire : le MASE, ou Manuel d’Amélioration de la Sécurité des Entreprises, garant de notre système de management de la sécurité. C’est une illustration de notre volonté de placer la sécurité au cœur de nos préoccupations. En plus de cela, nous avons développé nos propres outils en interne, pour fournir par exemple en temps réel à nos clients une image du déroulement des opérations sur nos chantiers. Cela nous donne la possibilité de démontrer à nos clients qu’à chaque étape du chantier, tout est fait selon les normes, avec des personnels formés et suivis, et des matériels contrôlés et conformes à la réglementation. A cela s’ajoute un nombre incalculable d’analyses de l’environnement. L’ensemble contribue à une transparence à laquelle nous tenons vis-à-vis de nos clients et des pouvoirs publics. La transparence reste le meilleur moyen de valoriser nos compétences et nos savoir-faire.

Les chantiers de désamiantage et de dépollution prennent souvent beaucoup plus de temps qu’initialement prévu. Comment l’expliquez-vous ?

Le premier facteur expliquant cette tendance tient à la réputation du monde du bâtiment en termes de retard sur les constructions. A l’inverse, sur les chantiers de désamiantage, compte tenu des études et audits réalisés avant que le chantier démarre, le timing est généralement respecté, surtout compte tenu de notre expérience sur plus de 2200 chantiers.

Par contre il y a parfois des contingences que nous ne maîtrisons pas : nous travaillons sur la base d’un diagnostic que nous voulons le plus précis possible, avec des prévisions de délais pour enlever une certaine quantité d’amiante. Or ce diagnostic est parfois incomplet, et des matériaux supplémentaires contenant de l’amiante peuvent être découverts en cours de chantier. Il arrive que le périmètre exact du chantier ne soit pas connu avant le début de l’intervention.

Les évolutions de la règlementation sont-elles susceptibles de vous ouvrir de nouveaux marchés ? Va-t-on vers de nouvelles interdictions, après le plomb et l’amiante ?

L’éternel débat entre innovation et principe de précaution nous ouvrira sans aucun doute de nouveaux marchés un jour. On peut d’ores et déjà citer les particules fines, les émanations de peinture, ou encore les nanoparticules, dont on ne connait pas encore les effets à long terme sur l’organisme. On peut très bien imaginer qu’un jour, une future réglementation vise à l’interdiction des nanoparticules.

Nous utilisons de plus en plus de matières et de matériaux nouveaux dont nous ne connaissons pas les effets sur la santé à long terme. Si cela ne doit pas être un frein à l’innovation, l’exemple de l’amiante, solution miracle en son temps, doit tout de même nous inciter à la prudence.

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