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Christophe Gurtner, PDG de Forsee Power: "La solution de la propulsion 100 % électrique est devenu un choix économique rationnel et pertinent"

Grégoire Moreau
10/06/2014



En mars 2014, en plein pic de pollution de l’air à Paris, le Président de la RATP Pierre Mongin fait part de son intention de voir la RATP passer à un parc de bus 100 % électrique d’ici 2025. Une décision lourde de conséquences pour le premier opérateur de transport public d’Europe, mais riche de promesses pour un secteur de l’électromobilité, qui peine à entrer dans les habitudes des Français. Christophe Gurtner, PDG de Forsee Power revient pour RSE Magazine sur les solutions et les défis technologiques à relever pour concrétiser cette volonté de la RATP.



Un Gruau Microbus au Luxembourg, pays qui fut parmi les premiers à déployer des lignes de bus électriques (sous licence Creative Commons)
Un Gruau Microbus au Luxembourg, pays qui fut parmi les premiers à déployer des lignes de bus électriques (sous licence Creative Commons)

Qu'est ce qui selon vous motive une telle volonté de changement ?

Christophe Gurtner : Aujourd’hui, pour nous, la décision de basculement vers des bus 100 % électriques est le résultat de plusieurs raisons de contexte, certaines purement françaises. Tout d’abord, les tests qui ont été menés depuis plusieurs années sur des bus électriques sont techniquement probants. A cela s’ajoutent de vrais problèmes de pollution dans les grandes métropoles. Le sujet a été particulièrement d’actualité au mois de mars à Paris.
 
Au niveau européen, le problème de la pollution est sur la table tous les jours. Mais en réalité, l’impulsion vient de pays comme la Chine où la pollution est bien plus importante, et où une partie de la pollution part travailler le matin masquée pour limiter les conséquences de cette pollution sur la santé. Sur place, le basculement vers des bus électriques a été beaucoup plus rapide, et des milliers de bus sont déjà électriques. Nous avons aussi des problèmes de pollution et nous disposons également de solutions techniques. Mais nous devons maintenant les mettre en œuvre.

Le saut de l’électrique est-il économiquement intéressant ?

Economiquement parlant, passer d’un bus diesel conventionnel à un bus électrique, cela fait doubler le prix du bus. Il y a donc nécessité d’un investissement immédiat important. Actuellement la durée d’exploitation d’un bus est d’environ douze ans, quelle que soit la source d’énergie. Or l’amortissement d’un bus électrique peut être réalisé sur sept ou huit ans, compte tenu des économies générées en consommation de carburant et en entretien. Les simulations tablent sur 30 000 euros de carburant économisés par an, par bus, pour un surcoût à l’achat de 100 000 à 250 000 euros environ. En plus de cela, il est envisagé des systèmes de leasing sur les batteries.
 
L’opération est donc économiquement viable pour des agglomérations qui devront simplement distinguer coût d’achat et coût d’exploitation. La solution de l’électrique n’est plus un luxe d’écologiste convaincu, c’est devenu aussi un choix économique rationnel et pertinent.

Pouvez-vous nous décrire le besoin technique à l'heure actuelle ?

Avant de penser aux bus tout électriques, il convient aussi de parler des bus hybrides, solution de transition. Mais un bus hybride, c’est avant tout un bus diesel sur lequel est ajoutée une petite capacité électrique.
 
Pour les bus 100 % électriques, les axes d’effort techniques portent principalement sur l’autonomie des véhicules. Pour l’instant, un bus électrique fait moins de kilomètres en autonomie qu’un bus diesel. Mais l’intérêt de cette technologie, dans le cas des bus, ce que l’on dispose d’une flotte captive sur des trajets prédéfinis dont on connait exactement la longueur. Pour un particulier, il est complexe de dimensionner une batterie car l’amplitude du besoin est énorme : de 30 km en moyenne par jour, l’usager peut avoir besoin un jour de faire 200 km ou plus. Ce n’est pas le cas des véhicules à usage professionnel sur des trajets réguliers et connus à l’avance, comme dans le cas de la Poste par exemple. Dans ce cas-là, comme dans celui des bus électriques, il va être possible d’adapter finement le système de batteries au besoin et d’obtenir les meilleures performances possibles sur un type de trajet donné : une tournée de bus d’une journée, ce n’est pas forcément beaucoup de kilomètres parcourus, sachant qu’il y a entre autres la nuit pour recharger.
 

Où en est l'offre du côté des industriels ?

L’offre dépendra de nombreux facteurs, qui seront différents d’une ville à l’autre. Passer à l’électrique complet représente un certain nombre de contraintes, en fonction de la géographie des lieux : espaces urbains denses ou diffus, régions montagneuse ou plaines… La technologie utilisée et donc l’offre peuvent être variables. Pour les intégrateurs de systèmes de batteries comme nous, il s’agit de savoir s’il faut de l’énergie, un couple puissance - énergie ou la puissance seule. L’énergie déterminant très schématiquement l’autonomie, et la puissance l’aptitude aux accélérations et la facilité de recharge rapide.
 
Dans nombre de cas, il faudra jouer sur l’autonomie pour des longues distances. Mais à d’autres endroits, l’exigence d’autonomie pourrait être simplement la conséquence des difficultés à installer les infrastructures de recharges, comme dans le cas des centres-villes historiques. Il peut être envisagé également d’effectuer des charges partielles rapides de quelques minutes en début ou en fin de lignes. Ce type de technologie fera appel à des batteries disposant de bonnes capacités énergétiques mais aussi de puissance. Il existe aussi la possibilité de faire de la charge régénérative en cours de trajet.
 
En fonction de la géographie de la ville et de la structure urbaine, les agglomérations pourraient être amenées à choisir deux, trois ou quatre technologies différentes : longue autonomie et charge nocturne, autonomie intermédiaire avec charge en bout de ligne, systèmes de charges à chaque station… Il existe aujourd’hui des solutions techniques pour chacune de ces situations, répondant à une logique économique et apportant la performance requise.






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